Le secret pour avoir la victoire sur Satan. Premier dimanche de Carême (Année « A »)

L’homélie du Père Etienne, CSSp

TEXTES:
1ère Lecture : Genèse 2, 7 – 9; 3, 1 – 7a
Graduel : Psaume 50
2ème Lecture : Romains 5, 12 – 19
Evangile : Matthieu 4, 1 – 11

                       HOMÉLIE:

Le diable est un acteur important de l’évangile de ce dimanche, mais pour son plus grand malheur, pourrait-on dire. En réalité, il en est l’acteur malheureux.

On le voit s’inviter, de façon irrespectueuse et avec arrogance, dans la vie de Jésus, et essayer, par tous les moyens, de le dérouter, de le faire chuter. Mais on le voit surtout mordre la poussière et battre en retraite, abandonnant armes et munitions, comme un soldat en déroute.

Comme Jésus, nous faisons chaque jour l’épreuve de la tentation. Le même diable s’invite dans nos vies, sur nos chemins. Il nous trouble, nous fait douter, et parfois nous fait tomber. Mais surtout, il semble souvent fort, très fort, plus fort que nous. C’est la raison pour laquelle le combat contre le mal est perçu, pour la plupart d’entre nous, comme un combat perdu d’avance.

Jésus était tellement conscient de l’influence négative du mal dans notre vie chrétienne qu’il intègre ce combat dans la prière qu’il nous a enseignée : « Ne nous laisse pas entrer en tentation. » ˋAinsi, pas de vie chrétienne authentique sans combat permanent contre le diable, contre le mal.ˋ

Mais l’évangile de ce dimanche a pour but de tordre le cou à une « fake news », à un mensonge à la peau dure : le diable est fort, très fort, et on ne saurait lui résister.

Pourquoi est-ce que le diable n’est pas aussi fort qu’il n’en donne l’air ? Tout simplement parce qu’il est lâche. Comme avec Jésus, il nous attaque quand on a faim, quand on est faible, quand on est en difficulté, quand on est malade, quand on n’a plus les moyens pour nous défendre. Il n’est jamais aussi fort que lorsqu’on est faible, lorsqu’il n’a personne pour le contrarier. Il ne nous affrontera jamais à armes égales. Le diable n’a aucun panache, aucune noblesse dans son attitude.

Autour de nous, combien sont-ils à être, comme le diable, sans panache, à vivre sur la faiblesse et la misère des autres, à profiter des difficultés des autres pour s’enrichir, pour les exploiter ? Ne nous est-il pas arrivé, à nous aussi, d’entrer dans cette danse « diabolique » ? Dans le monde, combien sont-ils à être sans panache, à n’être forts que devant les faibles, les affamés, ceux qui souffrent de la misère, des guerres, des maladies ? Combien sont-ils, comme le diable, à conditionner leur aide, leur assistance, leur soutien ? ˋCelui qui parle fort devant le faible n’est pas fort, il est un lâche.ˋ`ˋ « A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. »

Une première victoire contre le diable sera de ne pas être soi-même diable pour son prochain ; de le soutenir dans sa faiblesse plutôt que d’essayer d’en profiter ; de lui donner à manger quand il a faim plutôt que de lui faire un chantage ; de partager avec lui ce que nous avons plutôt que de le narguer ; de respecter ses choix et sa liberté plutôt que de vouloir le dominer et le manipuler. C’est finalement adopter le comportement de Jésus devant celui qui a faim, celui qui est malade, l’étranger, le pécheur…

Une autre victoire contre le diable sera de ne jamais accepter qu’on profite de notre fragilité, de notre faiblesse, de notre faim. ˋˋRester digne malgré la faim, rester fidèle malgré les doutes, rester honnête malgré la pauvreté…ˋˋ Mais que ne sommes-nous pas souvent prêt à faire, à sacrifier pour un bout de pain ? Proclamer comme vérité d’évangile, le mensonge d’une personne, tout simplement parce que c’est d’elle qu’on tient notre pain quotidien…

Une autre victoire contre le diable, sera d’être assez courageux pour résister au chantage, aux menaces, aux pressions. ˋˋNe pas réduire sa vie, sa dignité, son honneur à ce qu’on a matériellement ou socialement, au point de penser qu’on n’est plus rien dès lors qu’on n’a plus rien.* Quel est le regard que je porte sur moi-même dès lors que je suis pauvre, que j’ai faim, que je n’ai pas de boulot ? ˋˋSi je continue de trouver en moi de la dignité, alors je serai prêt à résister aux assauts du diable.ˋ`ˋ

Une autre victoire contre le diable sera de rester assez modeste, humble dans ses prétentions. Est-il nécessaire d’avoir tous les royaumes du monde et leur gloire pour être heureux ? Est-il nécessaire d’avoir plus que tout le monde, d’être au-dessus de tout le monde pour être heureux ? Assurément non. Et pourtant, combien de fois, pour avoir plus que le voisin, le collègue, mon frère, mon ami, mon adversaire, mon concurrent, mon rival, n’ai-je pas été obligé de céder à la tentation trahir, de trahir ma conscience, de faire du faux, de mentir ? Notre orgueil nous pousse à la faute. Le diable redoute la personne humble et modeste. Il se réjouit de la présence de l’orgueilleux.

Dans son tableau de chasse, il n’y a que les faibles. Le faible, c’est celui qui souffre de la boulimie d’avoir et d’être ; le faible, c’est celui qui perd toute personnalité, tout sens de l’honneur dès lors qu’il a faim, et qui est prêt à s’agenouiller, à se soumettre même devant le diable pour avoir du pain. Le faible, c’est celui qui oublie que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais aussi de vérité, de fidélité, de loyauté, de dignité… Le faible, c’est celui qui n’a pas confiance en lui, c’est celui ou celle qui se caractérise par l’indécision, les hésitations, le manque de conviction et de fermeté… Quelles sont mes faiblesses, ces portes d’entrée qui donnent au diable le pouvoir dans ma vie ?

Le temps du carême est le temps où le chrétien, à l’exemple de Jésus, défait le diable, le boute hors de sa vie. C’est le temps où le chrétien refuse d’être la victime résignée face à une supposée invincibilité du diable. Mais la première défaite du diable n’est-elle pas que nous soyons convaincus que nous sommes plus forts que lui ?

🛐 Père Étienne NEMI, CSSp 🛐

« Restaurant Divin » du Père Guy Marcel, CSSp. (Audio)

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